jeudi 20 août 2015

François croit-il vraiment aux Évangiles ?


Rédigé par le Père X
SOURCE : The Remnant


La banalisation des miracles de Jésus dans l'histoire
Un court historique important.... vous verrez


Il y a quelques semaines la sonnette d'alarme a explosé dans ma tête quand quelqu'un m'a transmis un extrait d'une traduction d'un sermon que le Pape a prêché dans son récent voyage en Amérique du Sud reliant l'événement de la multiplication des pains et des poissons à l'Eucharistie. Laissez-moi expliquer.

Il y a environ deux siècles l'érudit protestant libéral Gottlob Paulus (1761-1851) a commencé ce qui allait devenir une tendance très populaire dans les milieux hérétiques allemands du savoir biblique « plus critique ». Paulus voulait identifier quelque fondement historique dans les récits évangéliques de la vie de Notre Seigneur et de Son Ministère ; son rationalisme des Lumières l’amenait à exclure tout ce qui était des éléments surnaturels, miraculeux de ces récits. Après tout, est-ce que toute personne vraiment éclairée ne reconnaît pas maintenant que les miracles sont impossibles de sorte que tous ces récits doivent être relégués à la catégorie de mythe ou de légende ? Le Professeur Paulus et son école de pensée ont donc opté pour une solution du « juste milieu » à savoir retenir les récits de l’Évangile comme étant en partie historiques mais les démythifier. Autrement dit, « les ré-interpréter » — les purifier ! — afin de donner une explication « rationnelle » et non surnaturelle pour les actions merveilleuses attribuées à Jésus.

Maintenant, d'autres rationalistes allemands plus radicaux tels que D.F. Strauss ont tôt critiqué Paulus à juste titre pour ses incohérences. Ils ont reconnu que les éléments miraculeux sont intégrés et inséparables des récits évangéliques de sorte que, si nous nions l'historicité de ces éléments particuliers, nous devrions logiquement nier la crédibilité historique de l'histoire toute entière dans laquelle ils se produisent. Selon Strauss et ses sympathisants du 20ème siècle comme Rudolf Bultmann, nous devrions rejeter comme mythiques les histoires évangéliques [de Paulus] du début à la fin en ne leur donnant aucune crédibilité historique que ce soit.

Cependant, la position à « mi-chemin » de Paulus n'est jamais complètement disparue de la mode. Pour de nombreux modernistes « soft » qui ne veulent pas rejeter complètement les récits évangéliques, ils offrent un compromis commode. Et malheureusement, cela a envahi l'école Catholique avec vengeance au cours des dernières décennies. Beaucoup de lecteurs de cet article auront probablement entendu ou lu quelque religieuse sans habit ou prêtre sans col assurant des catholiques vieux jeu et idiots que « le savoir moderne » a « montré » que le miracle évangélique des pains et des poissons — l'alimentation de cinq mille personnes — doit être démystifié. (Cet événement a été tellement considéré comme important dans l'Église primitive qu'il est le seul miracle du Ministère public de Notre Seigneur qui est raconté dans les quatre Évangiles : cf. Mt. 14, Mc 6, Lc 9, et Jean 6.)

Il n'y avait rien de surnaturel qui se passe ici, nous assureront ce Père ou cette Sœur, pas de multiplication actuelle des pains et des poissons par la puissance divine. Non, c’est juste que Notre Seigneur et ses disciples se sont trompés en pensant que la foule n’avait pratiquement pas de nourriture avec elle. Ainsi, lorsque Jésus a commencé à rompre cinq pains d'orge obtenus du garçon et qu’il les a distribués à ceux qui étaient plus proches de lui, son merveilleux exemple de compassion et de partage s’est propagé chez beaucoup d'autres dans la foule, en les incitant à sortir leur propre nourriture et à la partager avec leurs voisins, donc tout le monde a fini par assez manger — et il y eut beaucoup de restes ! Les Catholiques se font dire souvent que cela est la dernière fine pointe de l'exégèse biblique « scientifique » alors qu'en fait c’est un vieux châtaignier chenu qui remonte à Herr Doktor Professeur Paulus du début du 19ème siècle.

Heureusement, la papauté s’est tenue debout sur ce sujet même au cours du chaos post-Vatican II. Paul VI n’était pas exactement un Pape traditionaliste mais quand il prêchait au sujet des pains et des poissons et ce, à plusieurs reprises, il n'a jamais édulcoré l'élément miraculeux ; en effet, il l’a réaffirmé explicitement. Dans une homélie à la paroisse Saint-Jean Chrysostome de Rome le 16 Mars 1969, la présentation du miracle par Paul VI à partir du récit de St-Jean inclut ces paroles : « Avec prodigalité exceptionnelle, inépuisable, les pains ont alors commencé à augmenter de façon croissante en nombre des mains du Fils de Dieu ». (con eccezionale, larghezza inesauribile i Pani crescevano nombre nelle mani di Figlio di Dio).

Le sermon de François...
Ce que le Vatican a oblitéré
et ensuite complètement retiré
Ce que François a dit vraiment...

Hélas, c’était alors ; c’est le Pape François maintenant. Il y a quelques semaines, une sonnette d'alarme s’est déclenchée dans ma tête quand quelqu'un m'a transmis un extrait d'une traduction d'un sermon en langue anglaise que François a prêché lors de son récent voyage en Amérique du Sud, reliant l'événement des pains et des poissons à l'Eucharistie. Ce sermon a été retiré du site Internet du Vatican et ça incluait les paroles suivantes :

« Les mains que Jésus lève pour bénir Dieu au ciel sont les mêmes mains qui ont donné du pain à la foule affamée. Nous pouvons imaginer comment ces gens se sont passés les pains et les poissons de main en main jusqu'à ce qu’ils se rendent à ceux qui étaient les plus éloignés. Jésus a généré une sorte de courant électrique parmi ses disciples alors qu'ils partageaient ce qu'ils avaient, en en faisant un don aux autres et ainsi ils ont mangé à leur faim. Incroyablement, il y eut même des restes : assez pour remplir sept corbeilles ». (Souligné par mon correspondant).

Oh oh ! Mais était-ce, espérons-le, juste une de ces « fausses déclarations des médias » des paroles du Saint-Père que les catholiques conservateurs plaident souvent à sa défense ? Les traductions anglaises du Vatican des documents du Magistère et synodaux ont souvent en effet une teinte plus libérale que leurs versions originales. Par conséquent, puisque l'espagnol est une langue que je connais bien, je suis parti voir le site du Vatican pour le texte original de ce sermon. Il était prêché par le Pape François à Santa Cruz, en Bolivie, le jeudi 9 Juillet 2015 à l'ouverture du Congrès Eucharistique de cette nation et peut être trouvé ici.

Malheureusement, cette fois-ci, c’est exactement le contraire. J’ai été stupéfait de constater que le sermon de François s’avère être encore plus moderniste qu'il n'y paraissait à première vue ! Cela est dû en partie au fait que, dans ce cas, la traduction anglaise du Vatican a édulcoré une partie de la radicalité de la version espagnole d'origine et aussi parce que l'extrait ci-dessus qui me fut transmis par mon correspondant ne comprend pas quelques remarques de l’introduction très troublante qui se situe à quelques paragraphes plus haut et dans laquelle le Pape dit ceci :

«[Jesús] toma un poco de pan y unos peces, los bendice, los parte y entrega para que los discípulos lo compartan con los demás. Y este es el camino del milagro. Ciertamente no es magia o idolatría. Jesús, por medio de estas tres acciones, logra transformar una lógica del descarte en una lógica de comunión, en una lógica de comunidad (soulignement ajouté) ».

Voici ma propre traduction de ce qui précède :

[Jésus] prend un peu de pain et quelques poissons, les bénit, les rompt et les donne à ses disciples pour les partager avec les autres. Et c’est la façon dont le miracle se produit. Certes, il n’y a pas de magie ni d’idolâtrie. Au moyen de ces trois actions [prendre, bénir et donner], Jésus réussit à transformer un état d'esprit [de consommation] « jetable » dans un état d'esprit de communion, un état d'esprit de communauté (soulignement ajouté).

Voici maintenant le texte d'origine d’un paragraphe ou deux plus bas dont la version anglaise (voir ci-dessus) m’a été envoyée par mon correspondant :

Las manos que Jesús levanta para bendecir al Dios del cielo son las mismas que distribuyen el pan a la multitud que tiene hambre. Y podemos imaginarnos, podemos imaginar ahora cómo iban pasando de mano en mano los panes y los peces hasta llegar a los más alejados. Jesús logra generar una corriente entre los suyos, todos iban compartiendo lo propio, convirtiéndolo en don para los demás y así fue como comieron hasta saciarse, increíblemente sobró: lo recogieron en siete canastas"( soulignement ajouté).

Voici ma traduction de ce qui précède :

Jésus lève les mains pour bénir le Dieu du ciel, ce sont les mêmes mains qui distribuent le pain à la multitude affamée. Et maintenant, nous pouvons imaginer ceci : nous pouvons imaginer comment ils ont continué à se passer les pains et les poissons de main en main jusqu'à ce que la nourriture atteigne ceux qui étaient le plus loin. Jésus a réussi à générer un courant parmi ses disciples : ils ont alors tous partager ce qui leur appartenait en le transformant en un don pour les autres ; et voilà comment ils ont tous manger à leur faim. Incroyablement, il est resté de la nourriture : ils l’ont recueillie dans sept paniers (soulignement ajouté).

Les passages marqués en caractères gras ci-dessus créent toute une rupture dans la continuité d’enseignement de ce même passage de l’Évangile avec l’enseignement de Paul VI et (sans aucun doute) de tous les Papes précédents qui ont commenté ce miracle très important de l’Évangile. Le sermon du Saint-Père est loin d’être une « herméneutique-de-la continuité ».
Dans le premier des deux paragraphes de son sermon reproduits ci-dessus, nous notons l'insinuation du Pape (frôlant tout juste une affirmation claire) que la compréhension traditionnelle de ce miracle — à savoir que notre Seigneur a surnaturellement créé de nouveaux aliments là où il n'y en avait pas avant — qui le dépeindrait comme un « magicien », devrait donc être rejetée par les croyants éclairés d'aujourd'hui. Nous sommes donc invités à lire entre les lignes de ce texte l’argument spécieux à l’effet que ce qui est réellement arrivé, était un « miracle » métaphorique ou, au mieux, psychologique. François nous dit que la réalisation de Jésus ou la réussite fut suscitée par trois actions (et ce qui est significatif, c’est que ces actions ne comprennent pas la création de nouvelle nourriture à partir des pains originaux et des poissons) cette réalisation consistait à changer la mentalité égoïste et le sens du gaspillage des gens vers un esprit « communal » de « partage et de bons soins ». La traduction anglaise du Vatican ne parvient pas à traduire le verbe « lograr » du Pape qui signifie réussir à faire quelque chose ou voir à le faire ; or, son sermon nous communique la pensée que le but propre de Jésus était simplement de « générer » cette nouvelle « mentalité » plutôt que de produire une grande quantité de nouveaux pains et de poissons par la puissance divine. (Nous ne pouvons pas nous empêcher de nous rappeler le commentaire similaire de bas de gamme et méprisant du Pape François quand il a déclaré récemment à l'Académie Pontificale des Sciences qu'il ne faut pas lire le récit de la Genèse 1 de la Création d'une façon littérale — c’est-à-dire la façon dont presque tous les savants Chrétiens et Juifs pré-darwiniens la lisent — parce que cela semble dépeindre Dieu comme un « magicien » qui agite une « baguette »).

Dans le deuxième paragraphe cité plus haut, les mots « compartiendo lo propio » sont faiblement traduits en anglais sur le site du Vatican par une affirmation que les disciples de Jésus, en résultat du « courant » que Jésus est parvenu à générer, « ont partagé ce qu’ils avaient ». Cette traduction est (peut-être) sujette à interprétation à savoir que « ce qu'ils avaient » signifie ce qu'ils venaient juste de recevoir des Apôtres — à savoir, du pain et du poisson frais et miraculeusement créés, qu’ils auraient divisés et partagés à leur tour avec leurs voisins alors que de plus en plus en sortait des mains du Seigneur. Mais cette interprétation traditionnelle conviviale des paroles du Pape est exclue par ce qu’il a réellement dit. Car « lo propio » signifie « ce qui est le sien propre » — ce qui appartient à quelqu’un, sa propre propriété. Donc le Pape François dit clairement que les gens dans la foule, sous cette merveilleuse influence « miraculeuse » du « courant » émanant de Jésus, ont été motivés à partager leur propre nourriture qu'ils avaient apportée avec eux ; et ensuite, « incroyablement » (en effet !) en fait, il s’est avéré qu’il y avait tellement de nourriture que lorsque ces mille ou plus boîtes à lunch ont été ouvertes et généreusement partagées, il en est resté pas mal ! (François, rappelez-vous, a déjà un peu déraillé en nous assurant que la « magie » n'avait rien à voir avec cet événement.)

Ces Catholiques qui insistent que nous devrions à tout prix accorder à chaque déclaration papale une lecture « herméneutique-de-continuité » se concentreront sans aucun doute sur les premières paroles dans le second paragraphe cité ci-dessus, à savoir « Jésus lève les mains pour bénir le Dieu du ciel, elles sont les mêmes mains qui distribuent le pain à la multitude affamée ». Pris isolément et hors contexte, cette déclaration sonne comme une représentation rassurante du miracle que les fidèles chrétiens ont toujours compris à savoir que le pain consommé par la « multitude affamée » physiquement et miraculeusement a son origine des propres Mains de Jésus. Mais cette interprétation traditionnelle est manifestement incompatible avec le Pape François avec les explications qui précédent et qui suivent que je viens d’élaborer et qui sont commentées ci-dessus. Si nous prenons en compte ces commentaires (et aussi si nous supposons que François ne se contredit pas l'intérieur d'un même sermon), il devient clair que tout ce qu’il veut dire par ces paroles rassurantes superficiellement citées ci-dessus est que Jésus lui-même a commencé le processus de nourrir la multitude affamée en brisant cinq pains d'orge obtenus du garçon et en les distribuant d’une manière naturelle et non surnaturelle à ceux plus près de Lui. Puis ceci a supposément initié le genre de « miracle » que le Pape François nous dit qui a eu lieu. Mais c’était clairement seulement « entre guillemets » une « sorte de miracle » — un miracle dont il prend la peine de nous assurer qu’il n’était pas « magique » — à savoir ce « courant » mystérieux qui a « généré » une nouvelle « mentalité » parmi les autres dans la foule.

Conclusion

Ainsi, l'ensemble de ce que le Pape a vraiment prêché le 9 juillet sur l'événement des pains et des poissons nous amène à la conclusion inéluctable que lui-même, de concert avec tant de savants bibliques historiques critiques modernes, a endossé la bien-connue « démythologisation » rationaliste centenaire de ce miracle de l’Évangile. Donc, nous sommes laissés à se demander s’il pense que les autres miracles de Jésus peuvent exiger la même logique.

Bien sûr, la plupart de ce que le Pape François dit est bon et vrai ; mais la même chose peut être dite de nombreux clercs qui sont vraiment des Catholiques de « Cafétéria » : ils sélectionnent les Enseignements de l’Église qu’ils vont croire et laissent les autres qu'ils n’aiment pas sur la tablette magistérielle. Si nous voyons un éminent leader à la télévision portant une chemise qui a plusieurs taches sales nettement visibles, personne ne va essayer de justifier son apparence négligée en disant : « Oh, mais regardez comment tout le reste de sa chemise est belle et blanche ! » Pour défendre un Pape qui dit parfois des choses choquantes en soulignant les nombreuses excellentes choses qu’il a dites aussi, c’est pareil. C’est défendre l'indéfendable.

« Papa Bergoglio » a fait une de ses principales priorités claires dans le titre de son exhortation apostolique « La Joie de l'Évangile ». Mais combien de « joie » réelle allons-nous trouver dans « L'Évangile » (au singulier) si « les Évangiles » (au pluriel) sur lesquelles la Bonne Nouvelles du Salut est basée se révèlent être un mélange historiquement non fiable de faits et de légendes ?

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